L’Ombre Maléfique (T4 La Glace et le Feu)

MARTIN George R.R.

Article publié le samedi 29 décembre 2007 par Cyrallen
Mis à jour le jeudi 28 août 2008

Quatrième de couverture :

Haï de tous et constamment en butte aux intrigues de sa propre sœur, la reine régente Cersei, Tyrion le Lutin se démène de son mieux pour préserver Port-Réal et rallier à la cause de sa maison de grands seigneurs rétifs. Le nouveau roi du Nord, Robb Stark, menace les domaines Lannister et expédie sa mère auprès de Renly Baratheon, rival direct de son propre frère, Stannis. Obtiendra-t-elle l’union sacrée contre l’adversaire commun ? Que pèse la bonne volonté des hommes face aux rivalités des Dieux ou des puissances occultes qui se déchaînent en leur nom ? Comment Winterfell lui-même ne serait-il pas submergé sous les vagues d’adeptes du dieu Noyé ? Que peut la Garde de Nuit face aux sauvageons, complices insidieux des Autres ? A l’évidence, l’hivers vient pour le royaume des Sept Couronnes.

Maléfices, émeutes, guerre, confusion, haine, meurtres et démence, voilà ce que présageait, semble-t-il, sous ses noms divers, la comète rouge : l’imminence d’un chaos sanglant. Fétu que l’individu - qu’il s’appelle Arya, Sansa, Bran, Tommen, Myrcella… - dans cette furia de mort. Fétu que l’enfance, et pourtant, quelle vitalité !

L’avis de Cyrallen :

La valse des trônes continue, les couronnes passent de main en main, le petit peuple en proie à la famine menace de se soulever à tout moment depuis que même les pigeons et les rats viennent à manquer dans les ruelles sordides de Port-Réal, en proie à la pénurie.

La cruauté, omniprésente dans le roman, connaît une période faste, les injustices et les drames sont légions, les forces maléfiques éveillées se mettent volontiers à leur tâche de destruction et de chaos. L’ombre Maléfique est un tome particulièrement sombre de cette saga, les protagonistes sont désorientés, aveuglés par ce tourbillon d’évènements qui se déchaînent sous leurs yeux sans qu’ils puissent l’arrêter. Même les personnages comme Tyrion ou Cersei Lannister sont pris au dépourvu, eux qui sont pourtant passés maîtres dans l’art des complots les plus abjects. Le bon-sens a déserté les lieux, et même s’il en reste quelques lambeaux chez Lady Catelyn Stark et sa fille disparue Arya, que peuvent des individus isolés face à la folie qui s’apprête à déferler de toutes parts ?

Tandis qu’au-delà du Mur, Jon Snow assiste amèrement avec les patrouilleurs à l’avènement de l’hiver, et les Autres de tisser patiemment leur plan d’invasion, dans la plus parfaite indifférence des seigneurs des Sept Couronnes…

Plus l’intrigue avance, plus on devient accro, ne serait-ce que pour connaître le devenir de Westeros et des multiples personnages qui le composent. Un véritable régal !

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Extraits :

1- La main de Renly se faufila sous son manteau. Stannis s’en aperçut et, sur-le-champ, porta la sienne à son épée, mais il n’eut pas le temps de dégainer que son frère exhibait… une pêche. "En voudrais-tu une, frère ? demanda-t-il en souriant. De Haut jardin. Jamais tu n’as goûté rien de si fondant, sur ma foi." Il y planta ses dents, le jus lui en dégoulina au coin de la bouche.
"Je ne suis pas venu manger des fruits." Il écumait.
"Messires ! s’interposa Catelyn. Au lieu d’échanger des sarcasmes, nous devrions être en train de peaufiner les termes d’une alliance.
- On ne devrait jamais refuser de goûter une pêche, reprit Renly en jetant le noyau. L’occasion peut ne jamais se représenter. La vie est courte, Stannis. Souviens-toi du mot des Stark : "L’hiver vient"…" Il s’essuya les lèvres d’un revers de main.
"Je ne suis pas venu non plus me laisser menacer.
- Ni l’être ! aboya Renly. Quand je proférerai des menaces, tu le sauras. Pour parler net, Stannis, je ne t’ai jamais aimé, mais comme tu n’en es pas moins mon sang, je n’ai aucune envie de te tuer. Ainsi, si c’est Accalmie que tu veux, prends-le…, mais comme un cadeau fraternel. De même que Robert me le donna jadis, de même te le donné-je.
- Tu ne peux donner ce qui n’est pas tien. Accalmie m’appartient de droit. (…) Au nom de la mère qui nous porta tous deux, Renly, je t’accorde cette nuit encore pour revenir de ta folie. Amène tes bannières et viens me trouver d’ici l’aube, je t’accorderai Accalmie, te rendrai ton siège au Conseil et te désignerai même pour mon héritier jusqu’à ce qu’un fils me soit né. Sinon, je t’anéantirai."
Renly éclata de rire. "Tu as une épée ravissante, Stannis, je te le concède, mais ses chatoiements t’aveuglent, m’est avis. Regarde un peu par là, frère. Les vois-tu, toutes ces bannières ? (…) A mes côtés chevauche toute la chevalerie du Sud, et ce n’est là que ma moindre force. Mon infanterie suit, cent mille épées, piques et lances. Et tu prétend m’anéantir ? Avec quoi, je te prie ? Le minable clapier que j’entrevois tapi sous les murs du château, là ? (…) Tu peux bien te prendre pour un guerrier chevronné, Stannis, je m’en moque, à la première charge de mon avant-garde, il aura vécu, ton semblant d’armée.
- Nous verrons, frère." Comme il remettait l’épée au fourreau, le monde parut s’assombrir un brin. "Vienne l’aube, nous verrons."

2- L’agresseur, Tyrion ne le vit même pas. Il entendit seulement Sansa hoqueter, Joffrey lâcher un juron, puis, celui-ci ayant tourné la tête, il le vit s’essuyer le visage. Une bouse y dégoulinait, qui avait surtout encroûté sa chevelure blonde et éclaboussé les jambes de Sansa.
"Qui a fait ça ?" glapit Joffrey. Il se passa les doigts dans les cheveux d’un air furibond, secoua une autre poignée de merde. "Je veux le coupable ! hurla-t-il. Cent dragons d’or pour qui le dénoncera !
- Là-haut !" cria quelqu’un dans l’assistance. Le roi fit tourner son cheval sur place, la tête levée vers les toits et les balcons qui le surplombaient. Des gestes délateurs hérissaient la foule qui se bousculait, s’injuriait, injuriait Joffrey.
"De grâce, Sire, oubliez-le…" supplia Sansa. il n’en tint aucun compte. "Qu’on me l’amène ! commanda-t-il, il léchera cette saloperie, ou j’aurais sa tête. Ramène-le-moi, Chien !"
Docilement, Sandor Clegane sauta de selle, mais le mur humain lui bloquait le passage, à plus forte raison vers les toits. Les gens des premiers rangs eurent beau se tortiller et se démener pour s’écarter, ceux de derrière poussaient pour voir. Tyrion sentit venir une catastrophe. "Abandonnez, Clegane, le type ne vous aura pas attendu.
- Je le veux ! glapit Joffrey, le doigt brandi vers le ciel. Il était là-haut ! Taille donc au travers et ramène…"
La fin de la phrase se perdit dans un ouragan tonitruant de haine, de rage et de peur qui, subitement, se déchaîna tout autour, tels criant : "Bâtard !" à Joffrey, "sale bâtard !" d’autres invectivant la reine : "Putain ! Enfoirée de ton frère !", d’autres régalant Tyrion des quolibets d’"Avorton !’ et de "Nabot !", toutes aménités pimentées, ça et là, perçut-il, de vociférations telles que "Justice !", "Robb ! le roi Robb ! le Jeune Loup !", "Stannis !" et même "Renly !". De part et d’autre de la rue, la foule refoulait les manteaux d’or qui, vaille que vaille, croisaient les hampes de leurs piques en s’arc-boutant pour la contenir. Des pierres et des détritus mêlés d’immondices plus fétides encore se mirent à voler. "A manger !" hurla une femme. "Du pain !" tonna derrière elle un homme. "Du pain qu’on veut, bâtard !" En une seconde mille voix reprirent l’ancienne, et il n’exista plus dès lors de roi Joffrey, de roi Robb ni de roi Stannis, le trône échut au seul roi Pain. "Du pain ! clamait la populace comme un seul homme, du pain ! du pain !"


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