Lumière sur l’Abîme

SOMTOW S. P.

Article publié le vendredi 19 avril 2013 par Philémont

Quatrième de couverture

Fille-qui-n’a-pas-encore-de-nom vit dans la Muraille du Ciel et arrive en âge de choisir son métier. Bientôt, un nom lui sera donné et ses yeux lui seront arrachés — telle est la tradition. Mais la jeune fille a un secret : contrairement aux autres membres de son peuple, elle distingue les non-ténèbres, les choses et les gens qui les peuplent. Bien décidée à profiter de ce don, elle quitte sa famille, en ignorant que derrière la cruauté de la tradition se cachent ses véritables maîtres, les Inquisiteurs — des êtres terribles, capables de détruire des planètes entières.

Récit d’aventures initiatiques, description minutieuse d’une tyrannie dissimulée sur plus d’un million de mondes, Chroniques de l’Inquisition évoque les meilleurs romans de Jack Vance. Rarement une œuvre de space opera aura fait montre d’une telle chatoyance et d’une telle cruauté.

S.P. Somtow, né en 1952, est l’artiste thaïlandais le plus connu au monde. Chef d’orchestre de renommée internationale, il est, entre autres, l’auteur de la trilogie Vampire Junction.

L’avis de Philémont

Lumière sur l’Abîme a été écrit au début des années 1980. Traduit en français par Jean-Paul MARTIN en 1984 (sous le titre Lumière sur le détroit et sous les prénom et nom d’auteur Somtow SUCHARITKUL). L’auteur a toutefois révisé son roman en 1986. C’est cette nouvelle écriture qui donne lieu à la présente édition, la traduction initiale ayant elle aussi été révisée par Gilles GOULLET.

Lumière sur l’Abîme est un space opera. Loin dans le futur, l’humanité s’est répandue à travers l’univers et préside à la destinée de plus d’un million de mondes. Le régulateur suprême c’est l’Inquisition. Il s’agit d’une caste de surhommes, dont les pouvoirs semblent illimités et la vie infinie. Elle veille tout particulièrement à réprimer les utopies qui peuvent naître ici ou là, la sanction étant systématiquement l’annihilation pure et simple des mondes qui ont donné naissance à de telles hérésies.

Sur Gallendys, le destin du jeune paysan Kelver bascule quand il rencontre la non moins jeune Touche Ténèbres qui vivait jusque-là dans la Muraille du Ciel. Cette Muraille du Ciel abrite la seule colonie connue de Delphinoïdes, créatures mystérieuses dont le cerveau, relié à un vaisseau spatial, est l’unique moyen de voyager à travers la galaxie. En liberté, elles émettent un chant de lumière qui provoque chez les humains des révélations mystiques qu’il est nécessaire de neutraliser si l’on veut leur faire remplir leur rôle. C’est pourquoi l’Inquisition a créé une race d’humains sourds et aveugles uniquement affectés à cette tâche de construction des vaisseaux.

Décision ancestrale de l’Inquisition, ces surdité et cécité ont été obtenues par manipulation génétique et sont devenues aujourd’hui naturelles. Mais il arrive que des régressions génétiques se produisent, et c’est justement ce qui est arrivé à Touche Ténèbres qui entend et voit parfaitement. C’est ce qui lui permet d’appréhender le chant des Delphinoïdes et de sortir de la Muraille du Ciel.

C’est ainsi que Kelver et Touche Ténèbres vont entamer une quête dans le but d’informer les autorités inquisitoriales de la réalité de ce que sont et vivent les Delphinoïdes. Décision naïve et dangereuse s’il en est, ils vont toutefois avoir la chance de tomber sur un Inquisiteur rebelle, Davaryush, qui va mener sa propre enquête en compagnie des enfants avant de prendre une décision qui, à terme, risque fort d’être fatale à l’Inquisition, et de changer radicalement la société humaine.

Avec Lumière sur l’Abîme on est donc en présence d’un roman ambitieux, original et dépaysant. Il est en outre doté de grandes qualités littéraires, la prose de S.P. SOMTOW étant très belle, souvent poétique et musicale. Rappelons ici que l’auteur est compositeur classique, ce qui explique sa capacité à transcrire par les mots des sensations purement musicales.

Mais la beauté trouve aussi ses limites dans la mesure où elle nuit beaucoup au rythme du roman. La quête initiatique des deux adolescents est ainsi très vite prévisible et sans surprise. De même, la réflexion sur le pouvoir induite par l’univers mis en scène n’est qu’ébauchée. En d’autres termes, le récit est empreint de nombreuses longueurs, alors même qu’il n’est pas particulièrement long.

Entre beauté du texte et lenteur du récit, c’est finalement la seconde qui prime. C’est pourquoi le lecteur, sans forcément abandonner définitivement ces Chroniques de l’Inquisition, risque fort de se sentir incapable de lire d’une seule traite les quatre romans du cycle.


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