Fugues

SHINER Lewis

Article publié le vendredi 29 juin 2012 par Philémont

Quatrième de couverture

Ray Shackleford, réparateur de matériel hi-fi, se noie dans l’alcool et la musique. Il tente d’oublier une vie de couple chaotique et les brimades de son père. A la mort de ce dernier, sa vie bascule. Il se découvre un don singulier : il a le pouvoir de se projeter dans l’univers de ses groupes de rock favoris, d’enregistrer des versions inédites de leurs chansons. Poussé par Graham Hudson de Carnival Records, il accepte d’enregistrer l’album mythique et inédit des Doors : Celebration of the lizard. Mais ces voyages incessants dans le passé se révèlent bientôt dangereux. Car à trop jouer avec l’espace et le temps, ne risque-t-on pas d’ouvrir les portes du domaine de la Mort ?

Fugues est à la fois un roman initiatique et un magnifique hommage au rock des années 60-70 ; on y croise entre autres Jim Morrison, Brian Wilson, Jimi Hendrix et les Beatles.

Lewis Shiner est né en 1950. Son premier roman, Frontera, a été nominé au prix Nebula. Mais c’est son deuxième roman, Deserted cities of the heart (à paraître dans la même collection), qui lui a valu d’être encensé par une critique unanyme, dont James Ellroy.

L’avis de Philémont

Fugues met en scène un homme qui se dirige vers la quarantaine en prenant conscience que sa vie personnelle est un désastre, et en découvrant qu’il a le pouvoir de se projeter vingt ans en arrière dans l’univers de ses groupes favoris. C’est l’occasion pour lui de voir et d’entendre ce qui est entré dans la légende du rock : ces titres et albums qui n’ont jamais pu être réalisés pour des raisons diverses et souvent tragiques. Dès lors ces retours dans un passé si riche musicalement deviennent pour lui une thérapie, ses entretiens avec Jim Morrison, Brian Wilson ou Jimi Hendrix contribuant peut-être à leur rédemption commune.

Hommage au rock de la fin des années soixante, Fugues est un très beau roman dans lequel Lewis SHINER a probablement mis beaucoup de lui-même. Car le personnage principal du roman ne se trouve pas parmi les personnages historiques et charismatiques à qui il donne vie, mais bel et bien dans ce personnage médiocre mais passionné qui continue de se chercher quand sa jeunesse est sur le point de prendre fin. Et avec lui il transmet superbement sa passion pour la musique de la fin des sixties, et utilise nombre d’éléments de sa vie personnelle pour donner de la substance à son personnage. C’est la mort de son père autoritaire avec qui il a toujours entretenu des relations conflictuelles ; c’est encore son couple qui part en déliquescence jusqu’à l’inévitable divorce.

L’argument fantastique du roman n’est d’ailleurs que secondaire. Ce qui compte ici c’est l’homme, et le regard désenchanté qu’il porte sur sa vie passée et à venir, ainsi que sur une époque à jamais révolue. A ce titre il est aisé de faire le parallèle avec un autre roman récemment réédité. Toutefois le sujet est traité de manière différente puisque quand MARTIN se place dans une perspective collective et sociale, SHINER lui préfère une approche purement personnelle et individuelle. Ce n’est pas moins intéressant et tout aussi fort d’un point de vue émotionnel. Cela porte à croire que décidément le mouvement hippie est un sujet éminemment romanesque en plus d’avoir été d’une richesse musicale rarement égalée.


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