Destination ténèbres

ROBINSON Frank M.

Article publié le mercredi 1er juin 2011 par Philémont

Quatrième de couverture

En mission d’exploration sur Séthi IV, le jeune Moineau dévisse d’une falaise. Très grièvement blessé, il est rapatrié sur son vaisseau-génération, l’Astron, pour y être soigné. Alors qu’il se remet lentement de ses blessures à l’infirmerie, on tente sans succès de l’empoisonner. Guéri, mais amnésique, Moineau ne peut que redécouvrir le monde où il est né : un vaisseau délabré, hanté par un équipage indifférent, voire hostile. Le capitaine de l’Astron est prêt à répondre aux questions de Moineau. Mais cet immortel semble avoir perdu la raison : il veut traverser la Nuit, une partie de la galaxie totalement dénuée d’étoiles, pour aller chercher des signes de vie extraterrestre de l’autre côté. Un voyage de cent générations, qui semble bien impossible pour un vaisseau aussi abîmé que l’Astron.

Fresque spatiale écrite comme un thriller, Destination ténèbres, souvent comparé à Moby Dick, s’est imposé dès sa parution, en 1991, comme un classique de la science-fiction américaine.

Frank M. Robinson est l’auteur du Pouvoir (Folio-SF). Écrivain, éditeur, il est mondialement connu pour son scénario de La Tour infernale.

L’avis de Philémont

Amnésique suite à un accident sur la planète Sethi IV, le jeune Moineau doit réapprendre à vivre à bord de l’Astron, ce qui n’est pas chose facile quand la communauté humaine qui l’occupe le nourrit de non-dits et autres mensonges, quand ce n’est pas de la haine pure et simple…

Le lecteur découvre alors avec lui cet univers clos, celui d’un vaisseau qui voyage dans l’espace depuis deux millénaires. Les hommes y naissent, vivent et meurent avec pour seul objectif celui de leur capitaine qui, lui, a bénéficié d’un allongement de la vie : trouver une autre forme de vie dans l’univers. On se rend vite compte aussi qu’au-delà des apparences l’Astron est une machine vétuste, sans cesse réparée avec les moyens du bord, et dont on se demande si elle pourra aller au bout de sa mission. C’est d’ailleurs pourquoi l’équipage est pour le moins partagé quant au bien fondé de son rôle.

Opposant de manière explicite équation de Drake (utilisée pour estimer le nombre probable civilisations extraterrestres) et paradoxe de Fermi (des civilisations auraient d’ores et déjà dû être détectées dans les systèmes solaires plus âgés que le notre), Frank M. ROBINSON ne nous propose toutefois pas un roman de Hard Science, mais un huis-clos oppressant dans lequel il s’intéresse aux hommes avant tout. C’est en premier lieu la façon dont une petite communauté humaine parvient à vivre dans un espace clos et restreint pendant des dizaines de générations ; c’est en second lieu la manière dont la foi s’oppose au doute quant à l’existence effective d’une autre forme de vie dans l’univers.

La dimension psychologique de Destination ténèbres est donc très importante. Elle est de plus mise en valeur dans un récit parfaitement rythmé dans lequel les codes de la science fiction sont associés à ceux du thriller. Et comme la prose de ROBINSON et la traduction de Jean-Daniel BRÈQUE sont de grande qualité, le lecteur comprendra qu’il tient là un roman de haute tenue. Alors ce n’est pas parce qu’il lui aura fallu vingt ans pour traverser l’Atlantique qu’il faut attendre plus longtemps pour en profiter.


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