La route

McCARTHY Cormac

Article publié le mardi 10 mai 2011 par Philémont

Quatrième de couverture

L’apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres et de cadavres. Parmi les survivants, un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d’objets hétéroclites. Dans la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers les côtes du Sud, la peur au ventre : des hordes de sauvages cannibales terrorisent ce qui reste de l’humanité. Survivront-ils à leur voyage ?

Né en 1933 dans l’État de Rhode Island, Cormac McCarthy, auteur de nombreux romans plusieurs fois primés, est l’un des écrivains américains les plus importants de sa génération, il est notamment l’auteur de No country for old men, adapté au cinéma par les frères Coen. La plupart de ses livres sont disponibles en Points.

« Ce roman vous étreint dans une émotion d’une intensité rarement atteinte dans la littérature. » Le Point

L’avis de Philémont

Premier, et probablement dernier, roman post-apocalyptique d’un des plus grands auteurs américains contemporains, La route met en scène un père et son fils qui errent vers le Sud, en quête d’une humanité dont ils pourraient bien être les derniers représentants. Sur cette route, ils ne rencontrent que désolation, pluies de cendres et quelques hommes qui n’ont plus d’humains que le nom puisque la rareté de la nourriture ont fait d’eux de véritables bêtes sauvages anthropophages. Ce qui les pousse encore et toujours vers l’avant, c’est l’espoir. Encore est-il que celui-ci se fait de plus en plus ténu, et que les côtes du Sud pourraient bien signifier pour eux la mort, au même titre que le reste de l’humanité.

A cette intrigue minimaliste ne pouvait que convenir une structure minimaliste. Et c’est bien le choix qui a été fait par Cormac McCARTHY qui construit son roman d’un bloc unique composé de petits paragraphes où il décrit les multiples étapes de la quête de « l’homme » et du « petit », lesquels n’ont même pas besoin d’être baptisés plus précisément puisqu’ils sont seuls. Il ne faut pas croire pour autant que le roman est simpliste ; bien au contraire, il s’agit d’une oeuvre riche à au moins trois titres.

Il s’agit d’abord d’un roman initiatique sur la transmission et la subjectivité des valeurs du père vers le fils et inversement. Ce faisant McCARTHY dresse un tableau particulièrement sensible de la relation entre ses deux personnages, lesquels sont liés par le désir de perpétuer la mémoire et la culture sans sombrer dans le désespoir en une période pour le moins ténébreuse. Il s’agit ensuite d’un roman métaphorique dans la mesure où la quête des deux protagonistes est tout simplement impossible, l’humanité ayant bel et bien disparue à jamais, et le lecteur le comprenant dès les premières pages. Il s’agit enfin d’un roman métaphysique, l’homme et le petit devant sans cesse reprendre la route en poussant leur chariot de supermarché, tel le Sisyphe de la mythologie grecque qui doit éternellement faire rouler son rocher dans le Tartare pour avoir osé défier les dieux. Et de même qu’HOMÈRE ne fait pas mention des raisons de ce châtiment dans l’Odyssée, Cormac McCARTHY n’explique pas les raisons de l’apocalypse, ni ne projette ses personnages dans l’avenir ; il demeure ancré dans le présent pour montrer que la vie vaut la peine d’être vécue, en dépit de l’absurdité de la condition humaine.

Pour toutes ces raisons, La route de Cormac McCARTHY est un très beau roman qu’il serait dommage d’ignorer sous prétexte que son sujet est convenu dans les littératures de l’imaginaire. Au contraire, son appropriation par un néophyte dans le genre est une grande réussite. Sans sensationnalisme, mais avec une grande profondeur, le roman doit désormais faire figure de modèle pour les auteurs qui voudraient s’y essayer à l’avenir.


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