Un choeur d’enfants maudits

PICCIRILLI Tom

Article publié le samedi 29 mai 2010 par Philémont

Quatrième de couverture

A Kingdom Come, bourgade du sud des Etats-Unis, la vie suit son cours, paisible. Thomas, unique entrepreneur de la ville, doit s’occuper de ses trois frères, reliés par les os du crâne, contraints de partager le même énorme cerveau. Mais d’étranges fantômes sortis du bayou — ou de son imagination — viennent le hanter. Ceux de son père qui s’est suicidé et de sa mère mystérieusement disparue ; celui d’un enfant de six ans qu’il a jadis retrouvé mort au cœur du marais ; et l’âme de sa grand-mère, clouée par une faucille au toit de l’école, il y a bien longtemps. Thomas devra affronter ce lourd passé et, si possible, en percer les mystères afin que Kingdom Come retrouve sa sérénité. La plume brillante de Tom Piccirilli dresse le portrait d’une Amérique effrayante, burlesque et ensorcelante qui évoque celle d’Harry Crews ou le Twin Peaks de David Lynch.

Né en 1965 à New York, Tom Piccirilli est l’auteur d’une douzaine de romans d’horreur. Il a été lauréat du Bram Stoker Award. Ses histoires mêlant le morbide, l’étrange et l’humour, servies par son style lyrique, font de lui un des nouveaux maîtres du fantastique contemporain.

L’avis de Philémont

Kingdom Come est une petite ville de Louisiane perdue dans le bayou, cette grande région marécageuse infestée de moustiques et d’alligators. Là (sur)vit une population hétéroclite en particulier grâce à l’unique entreprise de la ville gérée par Thomas, LE personnage influent de la région, et le seul à ne pas avoir sombré corps et âme dans l’alcoolisme, la drogue ou la sorcellerie. Pourtant lui aussi est affecté par un lourd passé, entre son père suicidé, sa mère disparue, sa grand-mère assassinée et ses trois frères siamois, reliés par les os du crâne, leur unique cerveau devant gérer trois personnalités différentes. Et puis il y a aussi cet enfant mort au coeur du marais, qu’il a découvert étant lui-même enfant, et dont il a laissé le meurtrier se faire dévorer par les alligators…

Un choeur d’enfants maudits est sans contestation possible un roman d’ambiance. Dans l’atmosphère moite du sud des Etats-Unis, Tom PICCIRILLI nous fait découvrir Kingdom Come par la voix de Thomas et de ses fantômes intérieurs. Entre la dégénérescence des habitants de la forêt de John Boorman dans Délivrance et les cauchemars éveillés de David Lynch dans la plupart de ses films, l’auteur dresse un portrait de son univers à la frontière entre le réel et l’irréel. Le réel c’est la misère et le pathétisme des habitants de Kingdom Come ; l’irréel ce sont les secrets enfouis et les non-dits permanents qui donnent au récit des allures d’oeuvre surréaliste et décalée.

Le roman n’est donc pas facile à lire puisque tout en symboliques et allégories. Si l’on veut malgré tout définir son intrigue ce serait celle d’une quête du passé de Thomas au travers de tous les évènements violents et douloureux qui ont marqué son existence. Quant à la morale de l’histoire, si l’on peut réellement parler de morale, c’est que la lutte contre ses obsessions est vaine, que l’on peut tout au mieux en comprendre les origines, mais qu’elles resteront à jamais enfouies dans son inconscient. A ce titre, qu’on le veuille ou non, elles seront transmises, de générations en générations, "par spasmes", et que l’attente d’une vie meilleure se perpétuera, à jamais (Kingdom Come…).

En plus de son atmosphère, Un choeur d’enfants maudits est donc une oeuvre marquante pour son propos. Celui-ci est certes pessimiste, mais il est rendu terriblement crédible par une prose dotée de grandes qualités littéraires. Dès les premières lignes on est plongé dans l’esprit de Thomas, et on ne le quitte plus jusqu’aux derniers mots. Quant aux nombreuses scènes violentes, physiquement ou psychologiquement, elles ne sont jamais gratuites et contribuent toutes au dessein de Tom PICCIRILLI.


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