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Du même auteur
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- Les années métalliques - Michel DEMUTH
- Je suis l’ennemi - Thomas DAY
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- In the court of the Lizard King - Jacques BARBERI
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- Pinton 1 et 2 de Eric Bury
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- La beauté des âges - par Julien Beauche
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- Les aventures de Llynn
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"Vous avez l’heure ?" de Cyrallen
Nouvelles & Extraits
Vous avez l’heure ? par Cyrallen :
Treize heure : pause déjeuner. Une aussi belle journée, ça ne se gâche pas en restant cloîtrée. Je quitte d’un pas guilleret la grande bibliothèque de l’université où je viens de passer quelques heures d’intenses révisions et décide de m’accorder un petit extra. Étrange comme la circulation est fluide aujourd’hui. Ah ! Ces maudits feux ont enfin été re-synchronisés entre eux ! Voilà qui va permettre aux piétons possédant comme moi un goût modéré du danger de traverser d’une seule traite le boulevard sans risquer de se faire écharper au passage. C’est qu’il possède déjà plusieurs victimes à son actif, ce boulevard. Un vrai Triangle des Bermudes.
Feu rouge. Je m’avance distraitement sur la chaussée. et manque de me faire estropier la seconde d’après par une voiture rouge lancée à vive allure. Un bras se détend comme un ressort et me tire vivement vers l’arrière. Je manque de m’affaler, mais l’inconnu me retient de justesse.
- Êtes-vous malade ? Ce n’est pas à nous de traverser ! Vous auriez pu vous tuer !
Consternée, je laisse mon regard errer entre la circulation qui ne ralentit pas d’un millimètre et le feu sur le trottoir d’en face qui affiche insolemment son beau rouge brillant. Je me retourne : personne. Feu vert. La circulation est suspendue, plus rien ne bouge à l’exception d’une vague de piétons qui s’engage d’un pas décidé en direction du trottoir opposé. Incertaine, je laisse passer quelques interminables secondes pour me décider, puis finis par me joindre au flot humain. Une fois en « sécurité », je mets un point d’honneur à vérifier que les voitures redémarrent dès que le feu passe au rouge. Y aurait-il eu une quelconque réforme du code de la route ? Je sais bien que je ne possède pas de permis de conduire, mais il y a des choses dont tout le monde devrait être averti, quand même ! Passablement irritée, je stoppe net devant une boulangerie traditionnelle aux pâtisseries appétissantes. Voilà qui va me permettre de me remettre de mes émotions.
- Bonjour, pourriez-vous me donner ce gâteau-là, celui avec plein de crème dessus ?
- Non, absolument pas.
Abasourdie, je regarde la vendeuse sortir un petit sachet arborant le nom de la boulangerie et y glisser le gâteau convoité. Et me le tendre gentiment.
- Rien d’autre, me demande-t-elle avec un sourire jusqu’aux oreilles ?
- Heu, ce sera tout, je vous remercie.
Après avoir payé et échangé un étrange au revoir/bonjour ( !) avec la commerçante décidément à côté de la plaque, je me retrouve sur mon banc favori au milieu du parc voisin pour déguster mon récent achat. Tiens ! L’imposante horloge qui domine tout le parc s’est arrêtée à douze heures précises. Cela doit dater d’aujourd’hui même : je passe tous les jours par ici et j’y jette invariablement un coup d’œil le matin pour vérifier depuis combien de temps je suis en retard pour le cours prévu. Je vérifie l’heure à ma montre : elle aussi s’est arrêtée à midi ! Quelle coïncidence ! Il faudra que je pense à changer les piles.
Un bon bouquin entre les mains, je lève la tête de temps en temps pour observer les passants. Qu’est ce qu’il ne faut pas faire pour amuser les enfants ! Tirer sa poussette en arrière, quelle drôle d’idée ! Et ce vieil homme qui lit son journal à l’envers. Il a probablement oublié ses lunettes, mais il aurait dû s’en rendre compte depuis le temps ! Je secoue la tête en me répétant que le monde est fou. Ou bien est-ce moi qui commence à délirer ? Nouveau coup d’œil machinal au poignet : 11h46. Mince ! L’équivalent d’un quart d’heure vient de se volatiliser. Mais ce qui me pose problème, c’est que cette fois c’est au sens propre du terme. Qu’est-ce qui se passe ? Je commence à m’affoler, mon cœur tambourine dans son antre, de plus en plus pressant. J’observe attentivement la petite aiguille : rien à faire, elle tourne à l’envers ! Le temps s’est inversé.
Paniquée, je quitte mon banc et croise une quantité de gens bien décidés à marcher à reculons, comme s’il n’en avait jamais été autrement. Incroyable. L’eau de la petite cascade près de l’entrée remonte le courant, l’ombre des arbres forme un angle inhabituel avec le soleil et même les placides nuages se déplacent dans le sens opposé à la brise. Que dois-je faire ? L’affolement devient incontrôlable. J’entends la radio par une fenêtre entrouverte : les paroles des chansons sont devenues incompréhensibles, à part peut-être pour les adeptes du verlan, mais je n’en fais pas partie. Je ricane nerveusement en me disant qu’il va peut-être falloir que je m’y mette si cette comédie persiste. En arpentant les rues en tout sens, je m’aperçois avec brutalité que la plupart des gens que je « croise » sont habillés de blanc immaculé et souriants, eux qui arborent si souvent l’usuelle parure du corbeau allant de pair avec son air revêche.
A bout de nerfs, je ne peux que m’adosser contre un mur pour éviter de m’effondrer. La vie dans son ensemble se déroule sous mes yeux à l’inverse de ce qu’elle devrait être. J’ai la sensation épuisante de remonter un courant imaginaire, de lutter contre des éléments qui fonctionnent de façon opposée à ce que je connais, à ce que je crois être la réalité. Mais je n’en suis plus si sûre. Qui peut dire à cet instant précis ce qui est à l’endroit de ce qui est à l’envers, ce qui est avant de ce qui est après ? Pas moi, en tous cas, je suis perdue. Les hypothèses défilent dans ma tête : serais-je entrée dans un monde parallèle aux notions inversées ? Aurais-je vécu tout ce temps dans un monde qui m’est propre sans m’en apercevoir ? Serait-ce un gigantesque canular de 1er avril ?
Pendant que les méandres de mes pensées effectuent leurs circonvolutions complexes, j’ai peine à remarquer la boule de papier matérialisée de nulle part qui vient heurter le mur à quelques centimètre de mon bras. Avec les quelques grammes de curiosité que je parviens à rassembler, je me baisse pour la ramasser et la déplie du mieux possible en me relevant.
« Ce qui vous arrive bien malgré vous est une erreur de programmation fortuite du système local de pointage. Ne vous inquiétez de rien, nous nous occupons de tout. Nos meilleurs spécialistes sont déjà au travail. Vous devriez réintégrer votre espace privé au plus vite. Merci de votre compréhension et veuillez accepter toutes nos excuses pour le dérangement occasionné ». Pas de signature.
Mon intuition ne m’ayant pas souvent fait défaut, je décide sur un coup de tête d’enfourner rapidement le message dans la poche de mon manteau. A peine le mouvement terminé, un flash gigantesque venant de toute part m’aveugle et je perd conscience instantanément dans une nébuleuse ouatée.
Quelle belle journée, décidément ! Le creux de treize heure commence à se faire sentir au niveau de mon estomac. En quittant la faculté, je me heurte comme d’habitude au flux des voitures folles soulevant un vaste tourbillon d’air pollué avant que le feu ne passe au rouge. Et c’est pareil tous les cinq mètres : la traversée complète nécessite bien dix bonnes minutes si l’on ne veut pas risquer sa peau inconsidérément. Parvenue de l’autre côté, je passe devant une boulangerie aux gâteaux appétissants et ressort avec une nouvelle acquisition gourmande. Une fois à ma place habituelle dans le parc voisin, je finis mon déjeuner et décide d’entamer un nouveau chapitre du bouquin de SF passionnant déniché avec difficulté la semaine passée. Lorsque je lève la tête pour contempler l’immense horloge me faisant face, elle affiche fièrement un 13h42 métallique.
Maudissant le temps qui passe si vite et le rhume des foins, je cherche distraitement un mouchoir dans la poche de mon manteau. Mais quelle est cette boule de papier froissé que ma main vient de trouver ? Et en plus avec une écriture rouge incompréhensible qui ne m’est même pas destinée. Bof, rien ne vaut une corbeille à papier pour ce genre de prospectus. Une belle parabole dans les airs et hop ! En plein dans le mille !
© Cyrallen