Les Sondeurs vivent en vain (T1 Les Seigneurs de l’Instrumentalité)

SMITH Cordwainer

Article publié le dimanche 30 décembre 2007 par Cyrallen

Quatrième de couverture :

« … Et quand les premiers hommes à aller dans le Grand Extérieur arrivèrent sur la Lune, que trouvèrent-ils ?
— Rien ! répondit le chœur silencieux des lèvres.
— Aussi allèrent-ils plus loin, jusqu’à Mars et Vénus. Si les vais­seaux partaient tous les ans, jamais, jusqu’à l’An Premier de l’Espace, ils ne revinrent. Alors, un vaisseau revint avec le Premier Effet. Sondeurs, je vous le demande, qu’est-ce que le Premier Effet ?
— Personne ne le sait. Personne ne le sait.
— Personne ne le saura jamais. Trop nombreuses sont les variables. Comment connaissons-nous le Premier Effet ?
— Par la Grande Douleur de l’Espace, dit le chœur.
— Et par quel autre signe ?
— Par la nostalgie, ô la nostalgie de la mort ! »

Chef-d’œuvre mythique et singulier de la science-fiction, le cycle des Seigneurs de l’Instrumentalité compose au fil de ses tableaux une légende des siècles futurs, empreinte de poésie et d’une profonde humanité. Une vision inoubliable de notre avenir, d’une ambition comparable au Fondation d’Isaac Asimov ou à L’histoire du futur de Robert Heinlein.

Cordwainer Smith (1913-1966) est devenu, après une enfance passée aux quatre coins du monde, un spécialiste mondial en matière de géopolitique et de guerre psychologique. Après quelques textes de littérature générale, il publie en 1950 Les Sondeurs vivent en vain, son premier texte de science-fiction qui constituera la pierre angulaire des Seigneurs de l’instrumentalité.

L’avis de Philémont :

Les Seigneurs de l’Instrumentalité est une Histoire de l’Humanité projetée dans les vingt prochains millénaires. Et l’avenir c’est la conquête spatiale, dont les limites sont sans cesse repoussées. C’est aussi le bien-être de l’Homme, dont les dirigeants sont les garants. Ces derniers sont réunis dans un gouvernement dont les méthodes pour atteindre son objectif sont quelque peu totalitaires : c’est l’Instrumentalité du genre humain.

De fait il n’y a plus de guerres, les maladies disparaissent peu à peu et l’espérance de vie des Hommes est considérablement augmentée. Mais tous ne se soumettent pas à l’autorité de l’Instrumentalité, en particulier les sous-êtres, c’est-à-dire des animaux dont l’évolution leur a fait prendre forme humaine et leur a donné la parole. Ils demeurent toutefois considérés comme inférieurs aux humains véritables, ce qui les pousse à la révolte. Dès lors c’est l’Humanité toute entière qui prend conscience de l’austérité de son existence.

L’Instrumentalité met alors en place un projet de Redécouverte de l’Homme, qui consiste à réintroduire les cultures, les langues et les problèmes d’antan, comme la maladie et la mort. Mais les sous-êtres ne sont pas pour autant inclus dans le projet et ils continuent de se battre pour la reconnaissance de leurs droits…

Voilà pour le fond.

Quant à la forme, Les Seigneurs de l’Instrumentalité est une oeuvre qui réunit 27 nouvelles et un roman, auxquels la présente édition adjoint six autres nouvelles qui n’ont qu’un rapport indirect avec le cycle. Tous ces textes ont été écrits entre 1950 et 1966, année du décès de l’auteur. Cette structure implique que la narration est décousue, chaque texte se présentant plus comme une peinture d’un moment clé de l’Instrumentalité que comme une suite directe du précédent. Pourtant l’ensemble forme un tout cohérent, certains personnages pouvant être présents dans plusieurs récits, et les évènements contés dans tel ou tel texte étant la conséquence directe de ceux évoqués précédemment. L’imaginaire du lecteur est donc mis à contribution pour combler parfois les centaines d’années qui séparent deux récits.

La structure des Seigneurs de l’Instrumentalité a beau être décousue, la plume de Cordwainer SMITH ne l’est pas du tout. Avec un vocabulaire simple et un rythme juste, ni halletant, ni lent, l’auteur mêle habilement aventure, romance, spiritualité et tous les autres aspects de la psychologie de l’Homme. Sa prose est d’ailleurs bien souvent poétique et émouvante. SMITH flirte aussi avec le surréalisme, ce qui peut rendre obscurs certains textes.

Au total, si Les Seigneurs de l’Instrumentalité est une oeuvre qui n’est pas toujours facile d’accès, elle demeure aujourd’hui une oeuvre originale et majeure de la Science Fiction. Il serait donc dommage de se priver de cette lecture, d’autant que la présente édition est servie par un remarquable travail d’harmonisation des travaux des différents traducteurs que l’oeuvre a connu au fil du temps.

Notons enfin la présence, dans le quatrième tome, d’un essai d’Anthony LEWIS sur Les Seigneurs de l’Instrumentalité. Il prend essentiellement la forme d’un glossaire riche d’enseignements pour appréhender toute la richesse du cycle.


Réactions sur cet article

  • Les Sondeurs vivent en vain (T1 Les Seigneurs de l’Instrumentalité)
    10 octobre 2009, par Ryuuchan

    Alors là, il va falloir m’expliquer comment Gemmell, avec ses scenarii convenus et ses personnages caricaturaux, parvient à 4/5, et Smith, lui, ne parvient qu’à 3/5 avec de la réflexion, une superbe plume et des nouvelles réellement intéressantes ???

    Bref, ce cycle, bien que je ne l’aie pas fini, est et restera toujours pour moi un chef-d’oeuvre de la science-fiction. Sans compter que c’est précisément la saga qui m’a réconciliée avec ce genre, quand j’avais réussi à m’en dégoûter avec Peter F. Hamilton.

    Bref, je suis à la fois contente qu’il soit présenté ici, parce qu’il est peu connu de la génération actuelle, et en même temps déçue qu’il soit moins bien considéré que Gemmell, contre qui je n’ai absolument rien, mais dont je fne supporte pas la pauvreté des écrits…




 
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