Kirinyaga

RESNICK Mike

Article publié le samedi 29 décembre 2007 par Cyrallen

Quatrième de couverture :

Kirinyaga est le nom que portait le mont Kenya à l’époque où y siégeaient encore Ngai, le dieu des Kikuyu. C’est aussi, en ce début de XXIIème siècle, l’une des colonies utopiques qui se sont créées sur des planétoïdes terraformés dépendants de l’Administration.

Pour Koriba, son fondateur - un intellectuel d’origine kikuyu qui ne se reconnaît plus dans un Kenya profondément occidentalisé - il s’agit d’y faire revivre les traditions ancestrales de son peuple, en refusant coûte que coûte tout ce qui pourrait menacer la permanence de cette utopie africaine.

Mais l’existence de Kirinyaga, fondée sur des valeurs du passé, est-elle viable, dans ce monde de progrès en constante évolution ? Les nouvelles composant Kirinyaga ont été récompensées à dix reprises par les prix les plus prestigieux du genre (prix Hugo 89 et 91).

L’avis de Cyrallen :

Mike Resnick est l’auteur de la série des "faiseur de veuves" qui font partie de ses oeuvres les plus connues… Mais c’est sans compter avec l’arrivée de Kiniryaga.

Les nouvelles qui forment ce roman-mosaïque ont été récompensées de nombreuses fois, c’est qui me paraît judicieux vu la qualité et l’écriture de celles-ci.

Ce livre est un petit bijou, il fait partie des livres de SF qui soulèvent des questions et ne font pas que raconter une jolie histoire, aussi agréable soit-elle. La dimension philosophique est omniprésente, de façon intemporelle pour le lecteur. C’est un livre qui vieillira bien à mon avis, et rentre dans les classiques du genre puisqu’il aborde de front le problème peu exploité en SF du dilemme des relations entre tradition et modernité. Le problème est traité sous un angle original : la tentative de création d’une utopie coupée du reste de l’univers.

Certaines des nouvelles sont ouvertement révoltantes, surtout au début (je pense à Kirinyaga, et Toucher le ciel, qui sont particulièrement prenantes…) mais la complexité des décisions à prendre par Koriba, le fondateur, nécessite de tels cas de conscience que ces histoires sont là pour permettre de comprendre les ultimes conséquences de chacun des choix que fait Koriba, le "protecteur" de l’utopie de Kirinyaga.

Le lecteur voit le monde de Kirinyaga par les yeux de Koriba, et cette astuce renforce le poids des décisions que prends celui-ci, puisqu’on est en quelque sorte "dans sa tête" et qu’on ne peut s’en prendre à personne d’autre si l’utopie n’est pas ce qu’elle devrait être…

Les nouvelles se déroulent chacune à quelques années d’intervalle, montrant un stade de plus en plus avancé de l’utopie, son évolution au cours du temps, les problèmes logiques qui se posent et leur résolution par Koriba le fondateur.

En bref, un bouquin excellent, de la vraie SF comme on aimerait en voir souvent :)

Quelques éléments de scénario :

Au milieu d’un Kenya urbanisé à outrance en cette année 2123, le seul espoir de sauver les traditions des Kikuyus, un des peuples autochtones submergé par la technologie et la modernité venue de l’étranger, est de permettre à ses derniers représentants, tous volontaires, de s’établir sur une planète terraformée spécialement à l’image du Kenya d’antan. Le sorcier Mundumugu, fondateur de cette utopie Kikuyu, sera confronté à des situations dans lesquelles sa conscience devra se perdre s’il veut maintenir coûte que coûte les fragments en dispersion de cette… utopie ?

Prologue : Une matinée parfaite, en compagnie de chacals
1- Kirinyaga
2 - Toucher le ciel
3 - Bwana
4 - La manamouki
5 - Chant d’une rivière tarie
6 - Le lotus et la lance
7 - De vagues connaissances
8 - Quand meurent les vieux dieux
Epilogue : A l’est d’Eden
Postface de l’auteur.

Extraits :

1- Ngai est le créateur du monde. Il créa le lion et l’éléphant, la vaste savane et les hautes montagnes, le Kikuyu, la Masaï et le Wakamba. Ainsi, avec juste raison, mon grand-père et son grand-père avant lui crurent-ils que Ngai était tout-puissant. Puis les Européens arrivèrent, et ils tuèrent tous les animaux, couvrirent les savanes de leurs usines et les montagnes de leurs villes, assimilèrent les Masaïs et les Wakanbas, jusqu’au jour où il ne resta plus des créations de Ngai que les Kikuyu.
Et ce fut parmi ceux-là que Ngai livra Sa dernière bataille contre le dieu des Européens.

2- "Or, dis-je en les regardant derechef tour à tour, j’ai étudié en Europe et en Amérique, et moi seul, de tous les hommes et de toutes les femmes de Kirinyaga, ai vécu parmi les Blancs. Et je vous dis que moi seul, votre mundumugu, suis capable de distinguer les bons des mauvais faits. (…)"
" Ne vois-tu pas ce que tu dis, Koriba ? Si le mundumugu peut faire une erreur en permettant à un jeune garçon de parler avec son ordinateur, ne peut-il pas en faire une en ne le permettant pas aux Anciens ?"
Je secouais la tête. "L’erreur est de le permettre à tout autre Kikuyu que le mundumugu.
- Mais ton ordinateur pourrait nous apprendre beaucoup de choses, insista-t-il.
- Lesquelles ?" demandais-je d’un ton sec.
Il eut un haussement d’épaules impuissant. "Si je le savais, c’est que je les aurais déjà apprises.
- Combien de fois devrais-je vous le répéter ? Il n’y a rien à apprendre des Européens. Plus vous essaierez de leur ressembler, moins vous resterez Kikuyu. Cette utopie est la nôtre, celle des Kikuyu. Nous devons nous battre pour la préserver.
- Pourtant, dit Karenja même le mot "utopie" est européen, n’est-ce pas ? (…)
- "Utopie" n’est qu’un mot, expliquai-je C’est l’idée qui compte.


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