La Saga du Pliocène

MAY Julian

Article publié le samedi 29 décembre 2007 par Cyrallen

La Saga du Pliocène
- Le pays multicolore
- Les conquérants du Pliocène
- Le Torque d’or

L’avis de Jean-Marc Suzzoni :

Géologie et Science-fiction :

Pour un géologue, amateur de science-fiction, la plupart des romans de SF où les géosciences sont présentes (thèmes, sous-thèmes, décors ou facilités d’écriture pour l’auteur), constituent le plus souvent une déception certaine.

A côté de l’excellent roman d’aventures, quoique ancien, La Vermine du Lion (de Francis Carsac, un géologue lui), combien de ridicules navets tel Les Déportés du Cambrien (de Robert Silverberg, pourtant mieux inspiré d’habitude !), tels Le Cri du Tyrannosaure ou La Planète des Dinosaures (de Stephen Leigh).

Même si l’exactitude totale du côté scientifique d’un roman de science-fiction n’est pas ce qui me semble primordial, il vaut mieux éviter les "grosses boulettes".

Ainsi Silverberg aurait su en ouvrant n’importe quel précis de géologie que l’atmosphère terrestre au Cambrien devait être très différente de l’actuelle (donc irrespirable pour des humains sans appareillage), et que les Trilobites étaient des arthropodes des fonds marins et pas des "crabes" amphibies, donc difficilement ramassables sur les rivages par les déportés pour améliorer leur ordinaire…

Ce ne sera pas le cas ici. En effet, même si l’énorme Saga du Pliocène de Julian May n’est qu’une série de romans d’aventures, il n’y a pas vraiment de grosses erreurs géoscientifiques…

Preuve qu’avec un peu de travail on peut arriver à satisfaire le fan et le critique amateur et le géologue…

L’auteur :

Avant de découvrir le premier livre de Julian May, je ne savais pas grand chose d’elle. Heureusement un petit CV réalisé par Michel Demuth (par ailleurs auteur de l’excellente traduction) se trouve en introduction du roman.

Julian May est née en 1931 à Chicago et fut surtout une fan de SF, une accro à ces grandes réunions de milliers d’amateurs du genre (aux USA…) où ceux-ci viennent costumés pour acclamer ou huer leurs auteurs préférés.

Après une unique nouvelle de SF publiée en 1951, Julian May se métamorphosa, sous divers pseudonymes, en une mercenaire de la plume : articles scientifiques ou de vulgarisation, biographie…, durant 30 ans. Plus de 9000 articles sortirent ainsi de sa machine à écrire…

C’est le premier volume de la Saga du Pliocène : The Many-colored Land (1981) qui la fit reconnaître à nouveau du petit monde de la SF (nominé mais pas nommé pour les prix Hugo et Nébula de cette année là) ainsi que du grand public américain qui attend avec impatience chaque nouvel épisode de cette time-planet romance…

Après Temps Futur, qui, il y a une bonne quinzaine d’années, nous avait proposé en français le début de la Saga du Pliocène, J’ai Lu nous présente dans sa collection Fantasy (encore une erreur à mon avis car il s’agit évidemment d’une oeuvre de science fantasy…) la traduction (de l’excellent Michel Demuth) des premiers tomes de cette série, sous l’appellation de la Saga des Exilés.

- Le Pays multicolore - (The Many-colored Land, 1981)
- Les Conquérants du Pliocène - (The Many-colored Land, 1981)
- Le Torque d’or - (The Golden Torc, 1981)
- The Non-Born King -, 1982 (A paraître ?)
- The Adversary -, 1983 (A paraître ? )
- A Pliocène Companion -, 1984

Il existe deux autres séries se déroulant dans le même univers. La première composée de quatre romans concerne cette fois-ci le "Milieu Galactique". La seconde, avec trois volumes, commence à être traduite et éditée par Pocket, dont le premier titre, l’Éperon de Persée vient juste de sortir dans la collection Grand Format de cet éditeur.

Le Pliocène, et la Cataracte de Gibraltar :

Le Pliocène est une courte période dans l’histoire de la Terre. Elle s’étend entre - 5,3 et - 2 millions d’années, terminant l’Ère Tertiaire et précédant l’Ère Quaternaire.

En Europe occidentale, c’est la période des Mastodontes à 2 défenses (ancêtres des Éléphants actuels) des Mammouths, des "tigres à dents de sabres" (Machairodus), des ancêtres des petits carnassiers (chiens, chats…) et des herbivores actuels (chevaux, girafes…).

Le climat y est plutôt doux, bien que la fin de la période soit marquée par la première des grandes glaciations européennes, celle dite de Biber. Ce qui explique peut-être le développement des premiers hominidés intelligents ( ?) à stature verticale : les derniers Rama-pithèques et les premiers Australopithèques (connus pour le moment en Inde et en Afrique orientale)…

C’est donc un magnifique décor de romans d’aventures que Julian May va trouver là, assez familier et connu scientifiquement pour ne pas commettre de trop grosses boulettes, assez exotiques pour séduire le lecteur.

La seule "erreur" scientifique notable tient au fait qu’entre la fin des années 70, le moment où le roman a été écrit, et 1999, l’année où vous allez lire le premier tome de la Saga du Pliocène, la connaissance géologique a évolué notablement.

Effet, la théorie scientifique de l’existence d’un vaste bas-fond à l’emplacement de la Méditerranée actuelle, plusieurs centaines de mètres (voire deux kilomètres) plus bas que le niveau de l’Océan Atlantique à la même époque, théorie avancée à peu près à cette époque et dont l’auteur a profité, ne tient plus.

La cataracte de Gibraltar par laquelle l’Océan Atlantique aurait envahi et submergé le Pays Multicolore n’était qu’une très (trop) belle vue de géo-poésie et la glissade vertigineuse du Rhône n’était qu’une grande ria à la mode de Bretagne… Le bas-fond a évidemment existé, mais il n’était sans doute qu’une zone de lagunes ou de chotts, à peu près de niveau avec l’Atlantique.

Des travaux récents tendraient à prouver qu’il y avait une communication entre mer et océan par le Maroc, un peu au sud de Gibraltar, durant le Pliocène.

Dommage… Car la cataracte avait une classe folle…

Intrigues :

En ce XXIème siècle où l’humanité a été contactée par des civilisations extraterrestres et intégrée au Milieu Galactique, Théo Gudérian, physicien de génie, découvrit qu’au voisinage de la ville de Lyon, il y existait un lieu où on pouvait établir une communication à sens unique vers le Pliocène.

Bien vite, après la mort du professeur, Angélique, sa veuve, se trouva contrainte, pour de banales raisons d’abord financières, par simple altruisme ensuite, de laisser partir des aventuriers vers le passé. Au XXIIème, la civilisation terrienne, devenue la sixième des Races Unies, colonise plus de sept cents nouveaux mondes et développe parmi certains membres de sa population des pouvoirs parapsychiques et des métafonctions telles la télépathie et la psychokinésie.

En dépit de cet état plutôt satisfaisant, la société terrienne engendre pourtant autant d’inadaptés et d’exclus qu’avant le contact. Pour ceux-ci, il existe un exil à sens unique : le portail temporel du professeur Gudérian, pris en charge par une fondation après le départ d’Angélique Gudérian pour le Pliocène.

La trame principale de la saga est constituée par les aventures des huit personnages qui s’exilèrent dans la journée du 25 Août 2110 vers le Pliocène : un capitaine de nef interstellaire interdit de vol, un paléontologue de 133 ans, une religieuse voulant mener une vie d’ermite, un anthropologue recherchant la femme de sa vie partie elle aussi pour le passé, un mineur rêvant de vivre comme au temps des Vikings, une jeune athlète violente et perturbée, un jeune escroc, et une femme ayant subi un grave traumatisme cérébral. Les trois derniers de ce groupe d’exilés ayant des pouvoirs métapsychiques latents ou rémanents.

Tous se préparent à vivre dans un environnement sauvage, difficile, mais stimulant. Ils découvrent à leur émersion dans le passé que la Terre au Pliocène est localement colonisée par une population humanoïde venue d’une autre galaxie. Ces dernier sont eux aussi des exilés venus s’installer sur un monde non-habité pour y pratiquer leur rituels à la fois barbares et sophistiqués.

Capturés par la faction dominante de ces extraterrestres, les huit voyageurs temporels vont découvrir que leurs prédécesseurs sont tombés pour la plupart sous le joug psychique des étrangers…

Un poil de critique :

Pas de critique sociologique du monde contemporain ou d’interprétation philosophique du mal de vivre du XXème siècle, ni de prospective technologique ou scientifique, cette série est une saga au sens initial du terme : une suite de récits d’aventures.
Point.

Et une série qui sent bon le charme rétro des grands romans d’aventures de SF des années 50 : ceux de Poul Anderson, Lyon Sprague de Camp ou Raymond Hamilton…

C’est bien raconté, bien décrit, bien écrit et bien traduit.
Et moi je trouve cela très distrayant. Que demander de plus ?


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