Terremer (T1, 2, 3)

LE GUIN Ursula

Article publié le samedi 29 décembre 2007 par Cyrallen

Quatrième de couverture Pocket :

Livre I : Le sorcier de Terremer - A Wizard of Earthsea -, 1968
Livre II : Les tombeaux d’Atuan - The Tombs of Atuan -, 1971
Livre III : L’ultime rivage - The Farthest Shore -, 1972

Terremer est un monde d’île et d’eau où la sorcellerie est une science qui peut mettre en échec même les dragons. Et accessoirement faire souffler le vent dans les voiles des barques, guérir les maladies et apaiser les tremblements de terre.

Terremer conte l’histoire d’Épervier, dont le nom secret est Ged ; comment il fut choisi, enfant, pour recevoir l’enseignement de la sorcellerie ; comment, par défi, il fit revenir de l’au-delà une ombre qui faillit le terrasser et qu’il dut poursuivre jusqu’aux extrémités du monde ; comment, dans son âge mûr, il s’aventura dans le labyrinthe creusé sous les tombeaux d’Atuan, faillit y mourir, y retrouva une amulette et libéra la grande Prêtresse ; comment, dans sa vieillesse, il reçut la nouvelle que dans les Lointains le pouvoir des sorciers s’épuisait et comment, avec l’aide d’Arren, fils de roi, il rétablit l’équilibre.

Quatrième de couverture : Robert Laffont, collection Ailleurs & Demain - Classiques, janvier 1991, 480 pages

Il y a des dragons.
Et là où il y a des dragons, il y a des enchanteurs, une mer immense et des îles.

Mais le monde de Terremer n’est pas un univers conventionnel de fantaisie. Il n’appartient ni à notre passé, ni à notre avenir. Il est ailleurs. C’est un univers où la magie fonctionne et s’enseigne comme la science et la technologie dans le nôtre.

Terremer contient trois livres : Le Sorcier de Terremer raconte l’initiation de Ged en l’île de Roke et comment il devient un sorcier convenable capable de commander aux éléments et d’affronter les dragons, et aussi comment son audace faillit le perdre. Les Tombeaux d’Atuan évoquent la terrible histoire de la petite fille Tenar, choisie pour devenir la Grande Prêtresse des Tombeaux, qui haïra Ged et finira par combattre avec lui l’emprise des Innommables. Et enfin L’Ultime Rivage où le pouvoir des sorciers sera soumis à celui du temps, le grand rongeur.

Peter Nicholls, dans son Encyclopédie de la science-fiction considère Terremer comme « l’œuvre la plus achevée d’Ursula Le Guin ». Celle-ci, également célèbre pour La Main gauche de la nuit (Prix Nebula 1969, Hugo 1970) et Les Dépossédés (Prix Nebula 1974, Hugo 1975) a écrit un quatrième et dernier livre de Terremer, Tehanu, qui paraîtra prochainement dans la même collection.

L’avis de Cyrallen :

Tout l’Archipel qui forme ce monde est un étrange mélange de terre et de mer saupoudré d’une puissante couche de magie, dont seuls les meilleurs des sorciers formés à l’école de Roke, sur la Mer du Centre, peuvent en distinguer les possibilités.

Épervier, de son vrai nom Ged (celui-ci ne devant être connu que du mage qui le lui a donné à son entrée dans l’âge d’homme, ainsi que de ceux à qui il fait entièrement confiance), possède incontestablement les capacités pour devenir un grand sorcier, de ceux qui restent dans la mémoire des hommes sous forme de Gestes ou de Lais que l’on ne se lasse pas de chanter. Mais pour cela, il lui faudra auparavant poursuivre une ombre mortellement dangereuse qu’il a lui-même évoquée sur la mer jusqu’aux Lointains Est, au-delà de toute île connue, là où les sortilèges sont modifiés dans leur nature même.

Il lui faudra également récupérer les deux morceaux brisés de l’amulette d’Erreth-Akbe jusque dans les Tombeaux d’Atuan farouchement gardés, et enfin en passant par les îles où vivent les dragons, aller jusqu’au pays des morts, pour ressouder la trame du monde et lui redonner son unité perdue. Mais le chemin est long du petit chevrier de Gont à l’Archimage de toutes les îles du monde…

Un monde plein de poésie, des héros sereins, de la magie à outrance et pas toujours utilisée à bon escient : on se laisse porter par le courant comme Voitloin, le bateau presque vivant de Ged, peut le porter sur les mers de Terremer. Les dragons, rares déjà dans ce monde, sont impressionnants et malicieux à souhait, tout autant que le labyrinthe sous les Tombeaux d’Atuan est sombre et infini. Encore un très bon moment pour les amateurs de Fantasy :)

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Les neufs Maîtres de Roke + l’Archimage :

- Maître Chantre : enseigne les Gestes des héros et les Lais de Sagesse
- Maître Ventier : enseigne les arts du vent et du temps
- Maître Herbier : enseigne les us et propriétés des choses qui poussent
- Maître Manuel : enseigne la jonglerie, les tours de passe-passe et les arts de Changement les plus simples
- Maître Changeur : enseigne les arts d’illusion et les Sorts de Forme
- Maître Nommeur : enseigne le vrai nom de chaque endroit, chose et être
- Maître Modeleur : enseigne à l’intérieur du Bosquet Immanent d’où il ne sort que rarement
- Maître Appeleur : enseigne l’appel des énergies de l’univers, des choses et esprits, morts ou vivants
- Maître Gardien : gardien des portes de Roke

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L’avis de Philémont :

Terremer est un archipel où les îles sont innombrables et dans lesquelles coexistent hommes, divisés entre Hardiques et Kargues, et dragons, concentrés essentiellement dans les îles les plus occidentales. La vie y est parfaitement codifiée, en particulier du point de vue de la caste des magiciens dont les plus éminents d’entre eux sont formés au coeur de l’archipel, sur l’île de Roke. Le cycle nous en raconte une partie de l’Histoire, celle dont la Geste de Ged est au coeur.

Le premier volume, Terremer, est en fait la réunion de la trilogie initiale, publiée entre 1968 et 1972. Le sorcier de Terremer est consacré à la jeunesse de Ged et à la manière dont celui-ci est passé du statut de chevrier orgueilleux à celui de mage, avec la sagesse qui lui est indissociable. Dans Les tombeaux d’Atuan, Ged est confronté aux prêtresses d’un sanctuaire Kargue et ne devra son salut qu’à un allié pour le moins inattendu, Tenar, la Grande Prêtresse elle-même. Dans l’ultime rivage, Ged est devenu Archimage, le titre le plus prestigieux sur l’île de Roke ; pourtant, partout ailleurs dans Terremer, la magie semble perdre son pouvoir ; Ged part alors en quête d’une explication, et d’une solution, en compagnie d’un jeune prince.

Tehanu, bien qu’écrit 18 ans après L’ultime rivage, reprend le cycle là où il s’était arrêté et nous fait vivre les retrouvailles de Tenar et de Ged, trente ans après leurs premières aventures communes. Contes de Terremer est un recueil de cinq nouvelles nous plongeant dans l’Histoire de Terremer, remontant progressivement de la fondation de l’école de Roke à un épisode servant de pont entre Tehanu et Le vent d’ailleurs, ultime épisode du cycle. On y trouve également une description détaillée de Terremer en fin de volume. Le vent d’ailleurs voit les dragons menacer de nouveau les hommes, après plusieurs siècles de calme relatif. Je suis conscient que ce rapide synopsis du cycle ne le sert pas forcément, l’histoire ne semblant briller que par sa simplicité, se fondant sur une thématique maintes fois utilisée, et rarement de la meilleure façon qui soit. Et pourtant j’invite le lecteur potentiel à ne pas s’arrêter à cette vulgaire prose pour se plonger dans celle d’Ursula K. Le Guin, bien plus évocatrice. En effet, la simplicité apparente de l’intrigue cache un fond beaucoup plus subtil. Terremer est en effet une véritable leçon sur la vie et la mort, se construisant peu à peu, et qui nous amène à prendre conscience que l’Equilibre du Monde, quel qu’il soit, repose sur la connaissance de soi-même (Le sorcier de Terremer), sur celle de l’autre (Les tombeaux d’Atuan), et parfois sur le renoncement, quand celui-ci s’avère indispensable (L’ultime rivage). Et finalement les simples rapports entre hommes et femmes ne sont-il pas à l’origine de bien des maux ? (Tehanu). Il semblerait en effet que l’incompréhension mutuelle des deux sexes soit en grande partie responsable des déséquilibres qu’ait connu Terremer dans son Histoire (Contes de Terremer). La leçon du cycle d’Ursula Le Guin c’est tout cela à la fois, et bien plus encore (Le vent d’ailleurs).

Ce que n’est pas Terremer en revanche, c’est une Nième resucée de la Fantasy inspirée de Tolkien. Ici on ne trouve pas les créatures traditionnelles du genre. On ne retrouve pas non plus le héros invicible qui sort indemne des nombreuses batailles qui émanent son parcours. Terremer c’est plutôt une allégorie puissamment évocatrice, où la psychologie des personnages est extrêmement bien développée, ainsi que, et surtout, les relations entre ces individus. Cela n’empêche nullement l’univers de Terremer d’être parfaitement cohérent. En outre ce qui ne gâche rien, c’est que l’écriture d’Ursula Le guin, ainsi que la traduction, sont d’excellentes qualité. Le ton est plutôt mélancolique, triste diront certains. C’est tout simplement poétique , souvent émouvant, donnant régulièrement des frissons au lecteur.

Notons pour conclure que la force du cycle de Terremer va crescendo. Je ne peux donc que conseiller de lire les quatre volumes d’une traite. Mais que l’on se rassure, les romans sont courts et parfaitement rythmés. Et je suis certain que bon nombre des lecteurs refermeront ce cycle avec au moins une certitude : celle de le relire un jour ou l’autre. Je fais partie de ceux-là.

Bibliographie :

Le cycle de Terremer :

- Le Sorcier de Terremer
- Les tombeaux d’Atuan
- L’ultime rivage
- Tehanu
- Contes de terremer
- Le vent d’ailleurs

Le Cycle de Hain :

La Ligue de tous les mondes :

- 1 - Le Monde de Rocannon
- 2 - Planète d’exil
- 3 - La cité des illusions

Cycle de L’Ekumen :

- 1 - La Main gauche de la Nuit
- 2 - Le Nom du Monde est Forêt
- 3 - Les Dépossédés
- 4 - Le Dit d’Aka

Extraits :

1- Ged , lui, eut l’impression de se retrouver dans une importante cité, et ne sachant pas où aller, il demanda au premier habitant de Suif qu’il rencontra où il pourrait trouver le Gardien de l’École de Roke. L’homme le regarda un instant de travers avant de répondre : "Le sage n’a pas besoin de demander, et l’idiot demande en vain". Puis il continua sa route. (…) Ged interrogea une vieille femme tenant un panier plein de moules, et elle lui répondit : "On ne trouve pas toujours le Gardien où il est, mais parfois on le trouve où il n’est pas", puis elle se remit à vendre ses moules à la criée.

2- Épervier dit seulement : "Pour voir la lumière d’une chandelle, il faut l’emporter dans un lieu obscur".


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