Le livre de Cendres (Tomes 1 à 4)

GENTLE Mary

Article publié le vendredi 28 décembre 2007 par Cyrallen

Quatrième de couverture (Tomes 1 à 3) :

1476. Gênes est à feu et à sang. Les Carthaginois et leurs golems maléfiques ont envahi le sud de l’Europe afin de détruire l’empire de Frédéric de Habsbourg. Une nuit éternelle les accompagne. Rien ni personne ne semble en mesure de les arrêter. Pourtant, une femme de dix-neuf ans, capitaine d’une troupe de mercenaires, va se dresser sur la route de l’envahisseur. L’histoire a oublié cette guerrière aux cheveux trop blonds. Elle s’appelait Cendres, et la légende dit qu’elle était plus farouche que le lion et guidée par la voix d’un saint.

Avec les quatre volumes du Livre des Cendres, récompensé par le British Science Fiction Award et le Sidewise Award, Mary Gentle nous invite à découvrir une Europe médiévale transformée en un gigantesque champ de bataille. Cette fresque brutale, mais aussi d’une grande sensualité, est d’ores et déjà considérée en Angleterre et aux États-unis comme un des classiques du genre.

Quatrième de couverture (Tome 4) :

Les Carthaginois assiègent Dijon, et le roi-calife en personne est venu assister à la chute de la Bourgogne. Prisonniers d’une cité hivernale pilonnée par les machines de guerre ennemies, où il ne reste rien à manger à moins de commencer à dévorer les bébés, Cendres et ses hommes n’ont plus d’espoir… Mais ce serait oublier les leçons de l’Histoire : « Cendres ne perd jamais ! »

« Loin des grosses ficelles du genre, Mary Gentle déploie tout son talent à travers une fresque hallucinante, violente, brutale, mais toujours intelligente et subtile. L’art de l’ellipse est ici remarquablement bien utilisé, l’auteur réussissant la prouesse d’évacuer les questions les plus pressantes au profit d’une action savamment menée, autour de personnages aussi réussis qu’attachants. Passionnant et divertissant, Le Livre de Cendres est un texte de toute beauté à conseiller sans modération. »
Patrick Imbert, Bifrost.

Mary Gentle, Anglaise, est née en 1956. On lui doit une bonne douzaine de romans dont Les Fils de la sorcière. Le Livre de Cendres, véritable succès commercial et critique, l’a révélée au grand public.

L’avis de Philémont :

En 1476, Cendres, jeune femme d’une vingtaine d’année est à la tête d’une troupe de mercenaires qui se met au service de tout Seigneur qui a besoin de ses services, et qui accepte de les payer. Cette année-là les contrats ne manquent d’ailleurs pas, une invasion Wisigothe venue d’Afrique du Nord déferlant sur toute l’Europe, en particulier sur la Bourgogne, au mépris de ce que l’Histoire " officielle " a bien voulu nous laisser. C’est en tout cas ce que Pierce Ratcliff, docteur en philosophie (Études sur la guerre) tente de nous montrer au travers de ses traductions de manuscrits d’époque…

On l’aura compris, Le livre de Cendres est présenté comme une étude universitaire du début du XXIème siècle qui vise à démontrer que l’Histoire telle qu’elle est connue et enseignée aujourd’hui ne serait pas forcément représentative de ce qui s’est réellement passé en ce XVème siècle. Mais que le lecteur se rassure, s’il est besoin, le ton employé est loin d’être académique. Au contraire, les traductions supposées de Ratcliff nous plongent bel et bien dans le quotidien de Cendres et de ses mercenaires, un quotidien extrêmement dur et violent, dans lequel Mary Gentle immerge ses lecteurs sans aucune concession. Il n’y a finalement que les intermèdes entre chacune des seize parties qui nous rappellent que nous suivons un travail de traduction de manuscrits d’époque, ceux-ci prenant la forme d’échanges d’EMail entre Pierce Ratcliff et son éditrice.

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Si le réalisme du Livre de Cendres est extrêmement bien réussi, et devrait ravir les amateurs de Dark Fantasy, en particulier ceux de La Compagnie Noire, il n’est toutefois pas dénué de défauts. En premier lieu, le ton des traductions est si cru qu’il atténue sensiblement la crédibilité globale du récit. En second lieu, et surtout, le rythme est si lent qu’il est très souvent difficile d’échapper à l’ennui. L’histoire qui nous est racontée couvre en effet une courte période d’environ sept mois que Mary Gentle nous décrit dans ses moindres détails sur pas moins de 2000 pages. Sachant que Cendres et ses mercenaires occupent finalement peu de lieux (la moitié du roman est consacré au siège de Dijon), autant dire que l’auteur a le temps de se consacrer à la psychologie de ses personnages (Cendres essentiellement) et aux détails sanglants des nombreuses batailles…

Il n’en reste pas moins que l’approche adoptée par Mary Gentle est pour le moins originale. Elle jongle parfaitement avec les genres. De l’Histoire (pour le contexte) à la Fantasy (pour l’ambiance moyen-âgeuse), nous ne sommes jamais très loin de la Science Fiction (l’Uchronie ?). Mais c’est sans conteste cette petite touche de Fantastique, qui apparaît ici ou là tout au long du roman, qui est essentielle au dénouement du récit, et qui lui donne une force indéniable.

A noter que l’édition française offre en prime une nouvelle dans le quatrième tome du Livre de cendres : La logistique de Carthage. Celle-ci nous plonge dans quelque événement antérieur à ceux du roman principal ; elle n’apporte guère plus par rapport au roman, mais le lecteur qui aura apprécié ce dernier sera probablement ravi de retrouver son ambiance, ainsi que Cendres quelques mois seulement après sa naissance…

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- Tome 1 : La guerrière oubliée (A secret history, 1999), mai 2004, 512 pages.
- Tome 2 : La puissance de Carthage (Carthage Ascendant, 1999), mai 2004, 528 pages.
- Tome 3 : Les machines sauvages (The Wild Machines, 1999), octobre 2004, 448 pages.
- Tome 4 : La dispersion des ténèbres (Lost Burgundy/The Logistics of Carthage, 2000 / 2002), mars 2005, 752 p.

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Extrait :

1- C’étaient ses cicatrices qui la rendaient belle.
Personne ne se préoccupa de lui donner un nom jusqu’à ce qu’elle ait deux ans. Jusque-là, alors qu’elle trottinait en quête de nourriture entre les feux de camp des mercenaires, tétant les chiennes à la mamelle et restant assise par terre, on l’avait appelée Gribouille, Barbouille, et Cendres au cul. Quand ses cheveux s’affinèrent, passant d’un châtain clair sans caractère au blond platine, ce fut le nom qui lui resta : Cendrine. Dès qu’elle sut parler, elle s’appela Cendres. A l’âge de huit ans, Cendres fut violée par deux mercenaires. Elle n’était pas vierge. Tous les enfants errants se câlinaient par jeu à l’abri sous les puantes couvertures de couchage en peau de mouton, et elle avait ses bons amis. Ces deux mercenaires n’étaient pas des enfants de huit ans, eux, mais des adultes. L’un des deux eut la grâce d’être ivre.

Comme elle pleurait, après, celui qui n’était pas ivre chauffa son coutelas au feu du camp et promena la pointe de la lame en partant du dessous de l’oeil de la fillette pour remonter en biais sur la pommette, quasiment jusqu’à l’oreille.

Comme elle pleurait toujours, il lui infligea, de colère, une deuxième estafilade qui lui ouvrit la joue sous la première, en parallèle. En braillant, elle se dégagea. Le sang coulait en abondance sur le côté de son visage. Physiquement, elle n’était pas de taille à manier une épée ou une hache, bien qu’elle ait déjà commencé à s’exercer. Elle était assez grande pour soulever l’arbalète bandée (qu’il avait imprudemment déposée, prête à l’usage, sur un charroi de la défense du périmètre) et transperça le premier homme d’un carreau décoché à bout portant. Elle était incapable de bander à nouveau l’arbalète toute seule. Elle refusait de s’enfuir. Elle tâtonna sur la dépouille perforée du premier mercenaire et planta le couteau de table de l’homme dans le haut de la cuisse du second, lui tranchant l’artère fémorale. L’hémorragie le tua en quelques minutes. Souvenez-vous qu’elle avait déjà entamé son entraînement au combat.


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