Le miroir de ses rêves (T1 : L’appel de Mordant)

DONALDSON Stephen

Article publié le mercredi 26 décembre 2007 par Cyrallen

Quatrième de couverture :

Térisa vit dans un bel appartement. Elle travaille pour une cause humanitaire. Mais elle n’a ni amour ni amitiés, seulement une peur : être irréelle, être vouée à disparaître sans que nul n’y prenne garde. Alors, elle s’est entourée de miroirs pour voir son image. Au moins cela. Un soir surgit Géraden, un jeune homme beau et aimable, qui lui demande de sauver son monde. Parce qu’il ne peut s’agir que d’un rêve, elle le suit dans le royaume de Mordant, où les miroirs sont instruments de pouvoir et de magie, fenêtres ouvertes sur d’autres espaces, armes de salut ou d’horreur selon ceux qui les utilisent, le Congrégat des Imageurs du roi Joyse ou les agents cachés d’autres puissances… Quand Térisa répond à l’appel de Mordant, elle s’y trouve en pleine tourmente ; d’abord spectatrice perdue, elle sera bientôt forcée d’agir, pour survivre et pour protéger ceux qui lui portent intérêt. Elle devra s’essayer à la haute politique, éviter les assassins lancés à ses trousses, subir l’émoi de son corps, les élans de son cœur, mais aussi craindre et espérer à la fois les pouvoirs qui sont en elle sans oser rêver de sauver ce monde.

L’avis de Jean-Marc Suzzoni :

Stephen Donaldson est un auteur de la littérature de l’imaginaire très peu connu en France. Trop peu connu. Et c’est bien dommage, car c’est un styliste comme on en rencontre rarement dans le domaine de la fantasy et de la science-fiction…

L’auteur et son oeuvre :

Après une enfance en Inde, où son père soignait les lépreux, Stephen Donaldson fut un des insoumis de la Guerre du Vietnam. La légende veut que sa première oeuvre fut refusée par plusieurs dizaines d’éditeurs… Il s’agissait de la colossale saga de fantasy en six volumes intitulée Thomas The Covenant (Les Chroniques de Thomas l’Incrédule en VF) qui fut finalement un phénoménal succès de librairie.

- Lord Foul’s Bane -, 1977
- The Illearth War -, 1979
- The Power that Preserve -, 1979
- The Wonded Land -, 1980
- The One Tree -, 1982
- White Gold Wielder -, 1983

En France, J’ai Lu publia une version tronquée, écourtée, massacrée, en trois volumes, qui sont une honte pour l’édition de la SF en France et un gros bubon purulent ayant valeur de stigmate éternel sur le nez de cet éditeur.

- Les Chroniques de Thomas l’Incrédule -
- Le réveil du Titan -
- L’Éternité rompue -

Ces trois livres ne correspondent qu’en partie aux trois premiers volumes en anglais. C’est hélas le seul moyen de survoler en VF la saga de Thomas le lépreux névrosé.

Donaldson continua ensuite sa carrière littéraire avec un second cycle fantastique (Mordant’s Need) en deux tomes, celui que je vous présente aujourd’hui, et dont Presses de la Cité puis Pocket firent une trilogie…

- Le miroir de ses rêves - (The Mirror of Her Dreams, 1986)
- Un cavalier passe - (The Mirror of Her Dreams, 1986)
- Le feu de ses passions - (A Man rides Throught, 1987)

Plus récemment, il s’est tourné vers la SF sombre, gothique et wagnérienne, avec Le Cycle des Seuils et dont on attend le quatrième volume en français depuis des années.

- La véritable histoire - (The Gap into Conflict : The Real Story, 1990)
- Le savoir interdit - (The Gap into Vision : The Forbidden Knowledge, 1991)
- Le réveil du Dieu Noir - (A Dark and Hungry God arises, 1991)

Et qu’on risque d’ailleurs d’attendre encore longtemps, car trop éloigné de la ligne éditoriale de cet éditeur.

Mordant, un château en hiver…

En sa jeunesse, après une guerre de plus de vingt ans, le roi Joyse avait unifié les sept fiefs du royaume de Mordant, petits états tampons ballottés au fils des siècles entre les vastes et puissants royaumes de Cadwal et d’Alend. Il avait ensuite, grâce à l’astuce et au savoir de l’Adepte Havelock, confisqué, à son profit et à celui de ce nouveau royaume, toute la magie des Imageurs en obligeant ceux-ci (sous peine de mort) à intégrer le Congrégat. Car en cet univers, la magie se manifeste par la fabrication, l’utilisation des miroirs et la maîtrise des images qu’ils renvoient…

Mais Havelock en poursuivant l’Archi-mage Vagel (un séide du roi Festen de Cadwal) à travers un miroir plat devint fou… Il passe maintenant son temps à jouer à saute-contre (aux dames…) avec le roi Joyse. Ce dernier, abandonné par sa femme Madlin, vieilli et fatigué, semble lui aussi se désintéresser des malheurs (routiers en maraudes, brigands, monstres d’Imagerie) qui assaillent les fiefs du royaume.

Devant le laxisme, l’inertie de Joyse, les responsables des Imageurs (les maîtres Barsonnage, Quillion, Erémis, Gilbur) ont convaincu le plus âgé et le plus inepte de leurs apprentis, Géraden (le septième fils du Domme, le septième seigneur du royaume !), de fabriquer un miroir pour invoquer un champion (leur choix se porte sur un guerrier en armure, armé d’engins à rayons !) afin de combattre l’ennemi invisible qui s’attaque à Mordant.

Mais Géraden, dans une manœuvre magique aussi peut habile qu’à son habitude, fait venir à lui, non le puissant guerrier (à la technologie sophistiquée) attendu, mais une frêle et insignifiante jeune femme : Térisa Morgan. Celle-ci est la fille unique d’un richissime new-yorkais, qui traîne son ennui, sa solitude affective, sa neurasthénie, ses névroses, entre son travail gratuit pour une oeuvre sociale (du secrétariat dans un hospice mal géré pour indigents), et son appartement de Madison Avenue où elle a tapissé les murs de miroirs afin de se prouver à elle-même qu’elle existe…

Un poil de critique :

Stephen Donaldson n’est pas un auteur facile d’accès, même en français. Ce n’est pas un auteur descriptif, comme le sont toute une génération de romanciers de SF ou de fantasy. C’est plutôt un auteur introspectif, un auteur dont les oeuvres sont riches en dialogues souvent longs et intelligents entre personnages à la psychologie complexe ou en méditations solitaires.

Sa fantasy, même si elle satisfait en apparence aux règles du genre (magiciens, monstres sanguinaires, princesses en détresse, complots politiques, combats désespérés pour sauver le monde…), comme pourrait le laisser croire le paragraphe précédent, qui ne résume QUE l’introduction de cette trilogie, n’entre pas dans les créneaux habituels de cette forme de SF.

La fantasy de Stephen Donaldson n’est pas "classique" (Tolkien, Zelazny, R. Jordan, G.G. Kay …). Elle ne s’apparente nullement à l’heroic fantasy à la Conan, sérieuse ou ironique (R. Howard, L. Sprague de Camp, J. Vance, D. Eddings, Mercedes Lackey). Ce n’est heureusement pas une fantasy "TSR-Jeux de Rôle" de hall de gare (une épouvante forme s’il en est)…
Elle est beaucoup plus proche finalement des oeuvres de fantasy ou de science-fantasy des grands auteurs féminins du genre comme Marion Zimmer Bradley (l’homosexualité et le féminisme triomphant en moins), Ursula Le Guin, Barbara Hambly, voire Jennifer Roberson (si son oeuvre était mieux traduite), ou masculins comme Ian Watson et Tad Williams. Stephen Donaldson est un auteur à découvrir…


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